dimanche 30 décembre 2007

Strange people I Meet

Hey, j'ai changé les noms, mais tout le rester est vrai (ou fictif)

Ce fut ainsi, ce ne fut pas ainsi... (il s'agit de trucs que je voudrais voir commentés: je songe à faire un medley à publier...lisez donc le fond...j'écris un roman dudes et dudettes!!!)

STEVEN

Steven
Général: Steven Graham a 51 ans, selon ses dires, mais il en paraît facilement 60. Il se promène constamment habillé d'un manteau vert qui, bien qu'il ne présente aucune déchirure ou saleté apparente, a l'air très vieux et sale. Il a l'air malade et décrépit, est vaguement jaune.

Première rencontre
Ma première rencontre avec lui résulta en l'achat de sa guitare pour 40$, en fait je l'ai en gage, mais il a l'air de vraiment s'en foutre, alors je suppose qu'elle est à moi. Je vais la garder pour lui encore un temps. Il m'a carrément avoué qu'il voulait s'acheter des quarts de coke avec l'argent. Comme il allait la vendre à tout vent, j'ai pris sur moi de lui fournir ses 40$ et sa gratification immédiate en lui spécifiant que sa guitare n'était qu'en prêt.

Je crois qu'en fait il se fout vraiment de la guitare et que j'ai cru à tort qu'elle était à lui. Il semblerait que ce fusse un gars qui lui aie donné sa guitare alors qu'il lui devait de l'argent, ou une autre histoire sans queue ni tête propre aux junkies toujours prêts à se délester de tout sauf de leurs 20$.

Il m'a ensuite vanté les mérites incroyables de la guitare, ce dont je lui ai clairement spécifié me foutre totalement en lui rappelant qu'il pourrait la ravoir pour ses 40$ sinon elle pourrirait quelque part dans mes apparts pour les siècles des siècles. Je refusais ainsi clairement d'en prendre possession et de me retrouver en position de quelqu'un qui doit à Steven la jouissance d'un « deal » miraculeux. Cette action a été extrêmement importante et je dois répéter cette attitude dans mes rapports avec toutes les autres cibles.

Rencontres subséquentes
Il y eut d'autres rencontres avec Steven. Le pattern était exactement le même, et son problème tout en étant extrêmement facilement identifiable par n'importe quelle personne douée d'empathie MINIMALE (même ELLE pourrait le dire si elle arrivait à l'endurer plus que 30 secondes...), est dénié avec une détermination étonnante par lui-même et dérobé à ses propres yeux, alors encore et encore il ne retombe pas seulement dans le même piège, mais dans la même exacte SITUATION identique répétée sans arrêt. Cela doit extrêmement miner son moral et sa confiance en lui.

La deuxième rencontre eut lieu le lendemain de l'histoire de la guitare. Il est revenu pour me parler, et j'ai perçu dans cette attitude une demande. Je lui ai demandé pourquoi il était dans la rue. Sa blonde l'avait jeté dehors, car elle était jalouse qu'il soit sur le BS et qu'elle doive travailler (ce sont ses mots). Je n'ai jamais fait semblant de croire ces justifications qui font reposer la responsabilité de sa situation sur les épaules de sa blonde, de son manque d'amis etc etc. Parfois il se met à pleurer sur son sort. C'est très enfantin et je lui rappelle toujours son propre rôle. Il l'admet toujours sur le moment, mais se remets aussitôt à nier. On ne peut pas lui faire confiance. Je ne lui prête aucun argent, même si je sais qu'il en a besoin, car je sais qu'il veut s'acheter de la drogue et proclame devant moi qu'il va arrêter seul et que c'est fini. C'est une attitude d'enfant qui essaie de maladroitement manipuler un adulte pour avoir un jouet, sauf qu'il est en train de mourir et je le lui ai carrément dit qu'il en avait moins à faire (de chemin) qu'il en avait de fait et qu'il devrait se donner une chance de bien finir en allant à l'hôpital. J'ai presque réussi, mais il s'est mis à m'assurer qu'il irait le lendemain. Je lui ai dit qu'on savait tous les deux que c'était faux. Il a nié. Échappé, mais je ne pouvais pas le forcer. Je l'avais presque eu.

Remarque: Steven a des sautes d'humeurs qui semblent pathologiques: il pleure amèrement sur son sort quelques secondes, puis il voit une benne à neige et se mets à rire: « Çà c'est moi je vais dans le camion hahaha ». On dirait de l'hyperactivité ou je ne sais pas quoi. C'est pour çà qu'avec lui je table sur le foutre dans un taxi pour Dollard-Cormier, en fait carrément pour Saint-Luc, en demandant au chauffeur de s'assurer qu'il entre (ne pas le laisser se défiler une fois qu'il aura fait le pas), car il semble incapable de « focus » et il a trop pris d'alcool et de cocaine pour être capable de gérer la pression de la rue sans rechuter (volonté très faible, il ne lutte qu'en apparence pour pouvoir me raconter ses problèmes et pleurer sur lui-même). C'est pourquoi à chaque phrase je défais brutalement ses justifications et expose immédiatement ses mensonges qui tirent sur le pathétique tant ils sont bâclés. Et il a toujours besoin de 20$. Je lui dit qu'il n'est pas digne de confiance, qu'il s'aveugle, qu'il va rester et empirer et peut-être crever s'il n'allume pas et je lui ai remis un papier avec l'adresse de Dollard-Cormier. D'un coup que l'impulsion soudaine arriverait. Mais je table encore plus sur l'hosto, il est très malade.

Troisième rencontre (26 décembre):Je ne lui épargne aucune réalité, aucun coup. Je le frappe très durement et parfois très brièvement il est sur le point de...mais encore aujourd'ui, il m' a raconté 1001 mensonges et a fini par acheter un quart avec je ne sais trop quel argent. Sa blonde l'avait encore foutu dehors brutalement au même motif que la dernière fois. (Même exacte situation). Encore une fois, il n'avait au départ aucune responsabilité, mais je lui ai dit qu'au contraire il en possédait une partie (sa blonde aussi par contre a l'air d'être fucked-up, mais c'est pas mes affaires). Il prend les choses du mauvais côté. Il parle de se trouver un emploi. Je lui dit qu'il a l'air à moitié mort, miséreux, jaune, décrépit, vieux, malsain. Il se recroqueville mais a bien reçu le coup. Je lui dit qu'il doit s'occuper de ÇÀ avant (et je ramène çà à Saint-Luc), donc de s'occuper, avant sa blonde et son très éventuel retour à l'emploi, de lui.

Il semble développer une admiration pour ma personne qui me confère une autorité sur lui. Çà pourra être utile de s'en servir, le cas échéant. Quand il aura fait le pas, je devrai mettre une attention spéciale à le féliciter chaleureusement, car sous ses dehors égoistes il est TERRIFIÉ par l'idée d'une aide du système. Cependant il le nie avec la dernière énergie. Il ne le VOIT pas. C'est évident comme la Lune de l'extérieur, mais pour lui il ne veut pas y aller par ORGUEUIL. Il n'a aucun orgueuil, et quand je le lui dit il se drape dans une pauvre imitation: je laisse tomber pour cette fois, inutile de le tuer moi-même.

C'est cette dernière défense qu'il me faut briser la prochaine fois. Il m'a témoigné un respect important aujourd'hui, en ne se rebiffant jamais à mes répliques acerbes et surtout en me donnant une boîte à cigare qui semble avoir une grande valeur sentimentale pour lui. J'ai accepté CE cadeau (elle est à moi maintenant). Je crois que par là il admettait en quelque sorte inconsciemment mon point de vue. Je prévois d'ailleurs qu'il utilise ce cadeau pour me réclamer de l'argent plus tard: auquel cas il apprendra le sens du mot « cadeau ». Je crois qu'il m'accorde assez de respect pour plier. Je me sens de toute façon plus fort, il ne peut me faire céder par le chantage, seulement par un seul acte concret et ses suites je lui reconnaîtrai la force.

Bref çà a progressé. Il m'a dit admirer mes couilles, que lui n'en avait pas. Je lui ai dit qu'il se prouverait en avoir si il se levait et allait à l'adresse sur le papier. Il a longtemps hésité en salle avant de me dire qu'il n'irait « jamais ».

J'ai espoir.

(26 Décembre 2007)

Nouvelle rencontre avec Steven durant ma nuit off du slavehouse. Je zonais dans la rue comme je le fais toujours. Très froide nuit, avec des chutes intermittentes de neige et de pluie glacée. Au coin des rues peu de hustlers, peu de pushers, juste ces crisses de runners qui cherchent la moindre câlisse de roche gratuite, même par nuit d'apocalypse...même les gars avec la roche sont pas sur le street, juste moi, les âmes perdues, les vautours, et les aveugles à tout çà qui fument des cigarettes sur le bord des bars en se plaignant de la loi antitabac.

Après avoir vu des sans-abri debout au coin des rues s'envelopper dans de vieilles couvertures et dormir dehors par ce temps affreux (mais quelle crisse de force ils ont...je ne loaderai jamais qu'on puisse les regarder de si haut quand une seule journée dans leur peau résulterait dans le suicide de tant d'imbéciles bien-pensants, de policiers moralisants et autres humains peu reluisants), je tombe sur Steven

recroquevillé, mi-debout, mi-rampant, les yeux perdus, manteau claquant au vent carrément arrêté au coin Berri-Ste-Catherine, une véritable allégorie de la victime de la Mort attendant les serres qui s'abattent sur elle dans le plus grand dénuement. Mon coeur se serre immédiatement: je le gèle tout de suite, je deviens plus froid que le monde environnant. Il m'a aggripé et j'ai repoussé sa main. Il m'a regardé sans comprendre et je l'ai giflé, J'ai fait carrément voler mes écouteurs et je lui ai hurlé qu'il se laissait crever et que puisque c'était comme çà je le laissais tomber right where he stood.

J'ai fait un pas, remis ma chaleur sur ma tête, repris la marche en ligne droite sans me retrourner.

À la guerre comme à la guerre, un soldat doit parfois tirer. Je ne suis pas attaché à ces gens: ils ne doivent pas recevoir de moi chaleur, mais lumière. La lumière, quand tu traînes dans le noir depuis la Nuit des Temps, elle brûle en câlisse, elle perce, elle effraie et crisse, elle te permet de voir pareil. Ma job c'est pas de leur chauffer les pieds, c'est de les allumer. Eux ils marchent ou ils veulent, c'est pas à moi de les suivre dans leur cheminement. Mais quand tout çà devient brutal, comptez sur moi pour les mettre à mal si c'est ce qu'il faut pour que le monde devienne meilleur, je ne ménage pas les coups.

Aucun commentaire: